Portrait de Chateaubriand

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Qui est l'artiste ?

Anne-Louis Girodet est un peintre né en 1767 et mort en 1824. Il a été un des élèves de Jacques-Louis David. Il est l'auteur de grands tableaux historiques, mais aussi de nombreux portraits.


Comment est née cette œuvre ?

Chateaubriand a commandé son portrait au peintre en 1808. Le tableau a été terminé en 1809, et exposé quelques mois plus tard au Salon de Paris avec pour titre Portrait d'homme méditant sur les ruines de Rome.

Chateaubriand a gardé son portrait chez lui pendant des années, puis il l'a confié à Juliette Récamier. Quand elle vivait dans son appartement à l'Abbaye aux Bois, elle avait le portrait de l'homme qu'elle aimait dans son salon, près de la cheminée. Il était à côté du portrait de Madame de Staël, et du grand tableau de Corinne au Cap Misène qui pouvait être caché par des rideaux rouges.

Comment est composé ce portrait ?

C'est un portrait devant un paysage : Chateaubriand est représenté dehors, dans la campagne italienne. Pourtant, l'artiste a peint ce portrait à Paris : c'est un décor reconstitué.

Si l'artiste a choisi ce lieu, c'est donc que le paysage a un rôle symbolique. Il représente des ruines de la Rome antique : on aperçoit le Colisée. L'écrivain avait été envoyé en 1803 par Bonaparte pour faire partie de l'ambassade française à Rome : il y a vécu un an.

A l'époque, les peintres aimaient représenter des paysages avec des ruines antiques, qui rappellent la grandeur de l'Empire Romain. Le Colisée était l'amphithéâtre des empereurs romains, où se déroulaient des spectacles de gladiateurs. Mais il y eut aussi des chrétiens qui y furent exécutés. Au moment où Girodet peint son portrait, Chateaubriand écrit plusieurs livres sur l'époque où la religion chrétienne commence à être adoptée dans l'Empire romain. Il vient de finir un livre, Les Martyrs, qui raconte l'histoire de deux jeunes chrétiens qui finiront par être tués dans l'arène du Colisée, dévorés par un tigre.

Contenu droite

Le paysage derrière lui évoque les deux aspects pour lesquels Rome est importante pour Chateaubriand : l'Antiquité et la capitale religieuse des catholiques. Mais le portrait est peint au moment où Napoléon envahit les Etats du Pape et fait du Souverain Pontife son prisonnier.

Montré jusqu'aux genoux, Chateaubriand est debout, accoudé à un muret recouvert de vigne, dans une pose assez libre. Il est vêtu d'un manteau brun, fermé très haut, qui ne laisse voir que très peu de sa chemise ; sa main droite tient le revers de son manteau. On imagine qu'il fait frais ; le vent souffle dans les cheveux de l'écrivain.

Chateaubriand, tourné vers la gauche, ne nous voit pas ; il regarde devant lui, il a l'air inquiet, mélancolique.

Le peintre a utilisé peu de couleurs : surtout du brun et un bleu froid pour le ciel. L'écrivain est représenté comme quelqu'un de solitaire, de pensif. C'est une vision romantique du poète : quelqu'un d'exceptionnel, qui a besoin de rester seul pour méditer, qui est perdu dans ses pensées mais voit plus loin que les autres. (Ci-contre Buste de Chateaubriand par David d'Angers présente les mêmes caractères).

Le temps orageux symbolise l'âme passionnée du poète ; Chateaubriand écrira du tableau : « il [Girodet] le fit noir comme j'étais alors » .
Napoléon, en voyant le tableau, a commenté : « Il a l'air d'un conspirateur qui descend dans la cheminée ».

Ce portrait d'un homme seul dans une campagne pleine de ruines, malmené par le vent qui souffle, parle aussi d'une époque difficile : on est en 1809 – la France est en guerre. Napoléon a conquis beaucoup de pays, Chateaubriand le considère comme un tyran. Peut-être le portrait nous montre-t-il l'écrivain inquiet de l'époque dans laquelle il vit, mais conscient d'être dans « le souffle de l'histoire », que des événements importants sont en train de se dérouler.